La démarche du député est fondée sur les articles 170 et 173 du Règlement Intérieur de l’Assemblée et traduit une exigence de transparence et de redevabilité face aux préoccupations de la population. L’interpellation articule 17 questions autour des six piliers du programme gouvernemental. Dans sa démarche, le député met d’abord en lumière le sort des grands projets d’infrastructures et demande à cet effet des éclaircissements sur l’état d’avancement technique et financier des stades Lumumba, Mfuki et Socol. « Quelles sont les raisons objectives qui expliquent le suivi apparent et exclusif du chantier du stade Lumumba, alors que ceux de Mfuki et de Socol semblent connaître une suspension prolongée, voire un abandon ? »
Plusieurs travaux lancés à Boma, Luozi, Mbanza-Ngungu et Songololo sont cités comme étant à l’arrêt, et des justifications techniques, administratives ou financières sont exigées. Mais le point le plus sensible concerne la construction du nouveau siège de l’Assemblée Provinciale, que l’interpellation associe à un emprunt de 20.000.000 USD. L’élu demande au Gouverneur de bien vouloir fournir la procédure de passation de marché, le coût total de l’œuvre, le montant décaissé à ce jour, ainsi que l’identité de la banque ayant octroyé cet emprunt.
Questions clés sur différents projets et la gestion des finances
Toutefois, la gestion financière provinciale est aussi au cœur des préoccupations du Député. Ce dernier interroge le Gouverneur sur la performance et la régularité de la perception des recettes par la Direction Générale des Recettes du Kongo Central (DGRKC), pointant du doigt les difficultés d’impayement et l’effectif jugé pléthorique d’agents. Une section entière est consacrée à la nouvelle Agence des Droits de Passage et de Pesage (AGDPP), à qui a été transférée la gestion des taxes de péage. « Quelles sont les motivations administratives, techniques ou stratégiques ayant conduit au retrait de cette compétence à la DGRKC au profit de l’AGDPP ? Cette agence figure-t-elle formellement dans le budget provincial de l’exercice 2025 ? »
L’interpellation couvre également la situation de la rétrocession due par le gouvernement central et la rétrocession due aux Entités Territoriales Décentralisées (ETD), ainsi que la problématique des exonérations accordées aux assujettis, notamment l’allègement de 50% des droits dus accordé à CIMKO sur la taxe d’estampillage. L’interpellation touche des sujets de société cruciaux. Concernant l’Éducation, le député exige des explications sur le retard d’environ huit mois dans le paiement de la prime de la gratuité de l’enseignement aux enseignants du primaire.
Sur le plan sécuritaire, il s’inquiète de la persistance de l’insécurité et des évasions récurrentes de prisonniers à Boma et Kasangulu, et demande pourquoi les mesures de réhabilitation des prisons n’ont pas été mises en œuvre. La Gouvernance est également ciblée par la non-opérationnalisation du Décret n°13/026 portant octroi du statut de villes et de communes, un processus demeurant non entamé plus d’un an après la prise de fonctions du Gouverneur.
Deux autres questions terminent l’interpellation. La première concerne le secteur minier et l’exploitation semi-industrielle aurifère menée, selon les informations du député, illégalement par la Société BETHEL MINING INVESTMENT à Seke-Banza, causant pollutions et spoliations. La seconde porte sur la Route Nationale numéro 1 (RN1), théâtre de nombreux accidents. « Quel est l’état des lieux des projets de parkings publics sensés mieux réguler la circulation sur la RN1 notamment à Kitadila, Songololo et Kasangulu ? »
L’interpellation pose aussi des questions délicates sur la quote-part des recettes des pétroliers producteurs, ciblant spécifiquement la création d’une sous-commission permanente chargée de la gestion de ces recettes. « Comment justifiez-vous le fait que cette structure capte automatiquement et mensuellement 20 % de ces impôts et taxes dont 20% sont affectés à son fonctionnement et 20% aux rémunérations… et ce, en violation flagrante des principes encadrant l’exécution du budget… ? »
Transparence et redevabilité
Au cours de la plénière, le président Victor Nsuami Mpaka a tenu à préciser que cette interpellation n’a pas pour objectif de le nuire, comme certains pourraient le penser. Il s’agit, selon lui, d’un acte parlementaire, conforme aux principes de transparence, de redevabilité et de bonne gouvernance.
« Les députés provinciaux veulent simplement obtenir des explications sur la gestion du gouverneur. Cela s’inscrit conformément à l’article 173, alinéa 1er, du Règlement intérieur. Nous allons notifier le gouverneur de province à l’issue de cette plénière pour qu’il vienne répondre dans un délai de huit jours », a déclaré Nsuami Mpaka Victor, président de l’Assemblée provinciale.
Ce dernier a également rappelé que l’interpellation est un instrument démocratique de contrôle de l’action gouvernementale et qu’elle vise avant tout à renforcer la collaboration entre les institutions provinciales. « L’Assemblée provinciale n’est pas un adversaire du gouvernement, mais un partenaire de développement. Nous avons le devoir d’évaluer les actions menées au nom du peuple pour garantir une gestion efficace des affaires publiques », a-t-il souligné.
Pour sa part, l’élu de Madimba, initiateur de cette motion, a tenu à clarifier le sens de sa démarche. Selon lui, il ne s’agit nullement d’un acte d’hostilité, mais d’un exercice normal du contrôle parlementaire, qui peut s’exprimer à travers des questions écrites ou orales.
« Pour moi, c’est un honneur d’interpeller le gouverneur de province sur la mise en œuvre de sa politique générale depuis son accession à la tête du Kongo Central. Dans le cadre de la continuité de l’État, il était question de poursuivre les actions inachevées par les gouvernements précédents, car elles demeurent des préoccupations majeures pour notre population. C’est dans cet esprit que le programme du gouvernement provincial prévoyait la poursuite des travaux des stades Lumumba de Matadi, Mfuki d’Incisé et Socol de Boma », a expliqué Cerlain Gonda.
Le Gouverneur Grâce Bilolo est désormais attendu devant l’Assemblée provinciale pour répondre à ces 17 points, un exercice de redevabilité qui s’annonce décisif pour la stabilité politique de la province.





